Article N° 8091

DOLIPRANE

Doliprane passe sous contrôle américain : un tournant stratégique et politique

Abderrahim Derraji - 05 mai 2025 08:05
Le Doliprane, médicament le plus prescrit en France avec 300 millions de boîtes vendues chaque année, change officiellement de pavillon. Le 30 avril 2025, Sanofi a finalisé la cession de sa filiale Opella au fonds d’investissement américain Clayton, Dubilier & Rice (CD&R), tout en conservant 48,2 % des parts. Cette opération marque la transformation d’Opella en une entreprise indépendante.
 
La cession concerne la branche «Santé grand public» de Sanofi, incluant Doliprane, mais aussi d’autres à prescription facultative, vitamines et compléments alimentaires. CD&R devient actionnaire majoritaire avec 50 % du capital, tandis que la Banque Publique d’Investissement (BPI), à la demande du gouvernement, entre au capital à hauteur de 1,8 %. Cet arrangement vise à préserver un droit de regard français sur les orientations stratégiques de 
l’entreprise. 
 
L’annonce de la vente, faite en octobre 2024, avait déclenché une levée de boucliers politique et syndicale, suscitant des inquiétudes sur la souveraineté sanitaire française et l’avenir des emplois industriels liés à la production du Doliprane. Plusieurs jours de grève avaient alors été organisés par les salariés d’Opella. Le gouvernement, bien qu’ayant validé l’opération, a tenté de 
rassurer en mettant en avant les garanties apportées sur les sites français.
 
Sanofi, de son côté, justifie cette opération par une stratégie de recentrage sur les médicaments et vaccins innovants. Le groupe annonce avoir perçu environ 10 milliards d’euros en numéraire dans cette transaction.
 
Opella est une entité importante, avec une présence dans 100 pays, 13 sites de production et 11 000 employés. La direction de Sanofi assure qu’il ne s’agit pas d’un désengagement total, mais plutôt d’un partenariat stratégique visant à renforcer les capacités d’investissement et d’innovation de l’entreprise désormais autonome.
 
Malgré cela, cette décision alimente les débats sur la capacité de la France à conserver la maîtrise de ses produits de santé essentiels, et pose la question plus large du rôle des fonds étrangers dans les industries stratégiques. Pour l’heure, les regards restent tournés vers les garanties d’emploi et de production en France, alors que le Doliprane demeure un symbole fort de la pharmacie française.
 

Source : rfi.fr